Dans cette page les spectacles vus au Festival d'Avignon 2018 et les critiques sur ces pièces.

 

THYESTE de Thomas Jolly

THYESTE- Thomas Jolly -Rouen-Avignon

THYESTE
Thyeste © Christophe Raynaud de Lage

Adaptation de la tragédie éponyme de Sénèque, THYESTE est une histoire de vengeance sauvage, extrême et surnaturelle. Alors qu'Atrée règne en paix sur Mycènes, son jumeau, Thyeste, séduit sa femme et s'empare du bélier d'or. Devant ce double vol, Atrée a la vengeance furieuse et sert à celui qui est son frère la chair de ses enfants en banquet.

Les thèmes de la pièce (l'adultère, le vol, l'infanticide et le cannibalisme) ont nécessité une immense créativité et on ne peut qu'être admiratif devant l'originalité de la mise en scène. Comment représenter ce qui n'est pas montrable ? Comment réaliser une monstration de monstres, de monstruosité incomparables ? La fonction cathartique de la tragédie est ici double : au delà de l'histoire familiale d'Atrée et Thyeste, les parallèles contemporains sont inévitables : la transformation radicale et subite d'Atrée en monstre est à l'image de l'effondrement du monde. On peut donc  voir une critique de la société actuelle dans les réactions d'Atrée : aveuglé par une soif de justice, le châtiment qu'il choisit dépasse le crime. Dépassé par ses émotions, obnubilé par la vengeance il tisse encore davantage son propre malheur et celle de son peuple. Alternant des passages d'une grande modernité (scène du slam du coryphée notamment) la pièce pose la question du futur, de l'avenir d' « une jeunesse impuissante face au chaos dans lequel elle devra vivre et grandir ». Cela permet à Thomas Jolly d'évoquer « le traité d'indulgence mutuelle » que Sénèque proposait déjà à l'humanité et qui semble le seul échappatoire possible.

Suivre l'actualité du metteur en scène / Site de la compagnie La Piccola Familia : http://www.lapiccolafamilia.fr/thomas-jolly/

IPHIGENIE de RACINE, par CHLOE DABERT, compagnie Larmor-Plage

Suivre l'actualité du metteur en scène / Site de la compagnie Héros-Limite de Chloé Dabert : https://www.heroslimite.com/

LA PIECE EST EN TOURNEE EN 2019

  • Cherbourg-en-Cotentin
  • du 29-04-2019
    au 30-04-2019
  • Le Trident
 
Iphigénie
Iphigénie © Christophe Raynaud de Lage

Le sujet de la pièce: la guerre de Troie est imminente et la flotte du roi grec Agamemnon est retenue dans le port d'Aulis depuis trois mois. L'oracle est consulté affirme que pour retrouver la clémence des dieux, la fille d'Agamemnon, Iphigénie, doit être sacrifiée sur l'autel de Diane.Ainsi l es vents se lèveront et la flotte pourra quitter le port.

Cette pièce interroge la notion de devoir, les actions effectuées à contre-cœur au nom d'une morale, d'une sorte de bien public. Le sacrifice se justifie-t-il toujours et est-il vain, cruel et à l'origine de maux pires que le remède ? Plus provocateur qu'on ne le croit le sujet de la pièce évoque également les oscillations de l'amour et de l'ambition. Chloé Dabert est complètement entrée en résonance avec le texte de Racine, faisant s'interroger sur le sens moral de cette expiation.

(On sait d'ailleurs qu'Agammenon ne l'emportera pas au Paradis puisque de retour de la guerre il périra de la main de sa femme Clytemnestre pour avoir sacrifié Iphigénie. Ce n'est pas du spoil il s'agit ici d'un autre cycle tragique : celui des Atreides).

Iphigénie est une sorte de préquel des Atréides. Dans un campement entre plage et mer, les protagonistes sont le jouet de leurs ambitions et de leur soumission aux Dieux et à l'humain aussi : Iphigénie, victime innocente est une femme au cœur de tous les enjeux, victime de l'ambition et des hommes belliqueux. La pièce baigne dans un climat de tension où l'on se prend à espérer une issue moins tragique. Mais la tragédie se moque des désirs des hommes et l'histoire avance inexorablement. Cruel, beau , poétique. A voir, profitez de la tournée.

IL POURRA TOUJOURS DIRE QUE C'EST A CAUSE DU PROPHETE de Gushad Shaheman - Bruxelles - Marseille

Suivre l'actualité du metteur en scène / Page facebook de Gurshad Shaheman : 

copyright Jeremy Meysen

 

Il pourra toujours dire que c'est pour l'amour du prophète © Christophe Raynaud de Lage

Il pourra toujours dire que c'est pour l'amour du prophète © Christophe Raynaud de Lage

LA PIECE EST EN TOURNEE EN 2019

 

Il pourra toujours dire que c'est pour l'amour du prophète est une performance où se rencontre paroles d'exilés, jeunes comédiens et composition électro-acoustique.

Les "parleurs" d'Il pourra toujours dire que c'est pour l'amour du phophète ont fuit leurs pays et sont en rupture de ban avec leur société, leur famille, leur culture pour des raisons identitaires, politiques ou encore à cause de guerres ou d'intolérances de leurs pays respectifs.

Réalisation conjointe du metteur en scène et comédien franco- iranien Gurshad Shaheman et du créateur sonore Lucien Gaudion, la pièce est une oeuvre scénique singulière. Une quinzaine d'acteurs partagent une parole qui circule à travers la salle, récusant toute mise en scène réaliste. Ce partage des récits et de retour d'expérience transforment l'espace en labyrinthe sonore. Le spectateur est au sein d'un dispositif exprimant la présence, la mise en scène qui semblait irréaliste devient progressivement hyperréaliste et le spectateur est embarqué dans ces réalités humaines. Une plongée émotionnelle où tout geste, même infime, est essentiel participant à nous inclure dans ces traversées intimes déchirées entre violence et amour, corps torturés et corps aimés. Gurshad Shaheman nous offre ici une sorte d'expérience sensorielle grâce aux mots. Le théâtre passe par les sens. Ce n'est pas la première fois ni la dernière fois qu'elle telle expérience sensorielle a lieu dans le théâtre de Gurshad Shaheman, voir critique de Pourama Pourama sur notre site (article en cours de rapatriement)

 

KEATUR DE SACHA WALTZ - Berlin

(c) Sasha Waltz & Guests

(c) Sasha Waltz & Guests

Site officiel de Sacha Waltz : https://www.sashawaltz.de/

LE SPECTACLE EST EN TOURNEE EN 2019

Kreatur parle du corps humain et des pressions qu'il subit, isolé ou au sein d'une communauté. Le ballet montre visuellement comment le corps subit la pression, se déforme. Au delà de l'intime, une réflexion sur le pouvoir, sa prise ou sa perte, l'altérité ou encore l'introspection, l'estime de soi : autant dire que la pièce véhicule des nombreux sens et ouvre la porte à de profondes réflexions. A l'origine de cette pièce la visite d'une ancienne prison de la Stasi par Sasha Waltz. Travail sur la mémoire,  le confinement inhumain, la station debout forcée, le continuel éveil et l'impossible repos. Kreatur est une pièce organique qui rappelle que l'immobilisme c'est la mort. Cependant pour la chorégraphe ce sont les constrictions autant physiques que physiologiques qui nous obligent au mouvement. Le corps est le terrain de luttes internes et externes, pris en étau entre des sensations concrètes d'emprisonnement et des sentiments de libération. La volonté de la chorégraphe est de rechercher ce qu'il y a de sombre et de lumineux en chacun de nous. Elle a donc souhaité travailler en collaboration avec de grands artistes, pour les costumes, l'espace et ses reflets, les sons métalliques ... Notons le travail sur les couleurs. Univers minimaliste noir et blanc, seule la peau et le vivant font couleur. Spectacle étrangement familier malgré son étrangeté, Kreatur nous met face à des sensations archaïques et touche à l'universalité. Impressionnante la danse où une créature noire pleine de piquants évolue sur scène, évoquant aussi bien la part sombre de l'humanité, qu'un virus ou une sombre menace omniprésente. Pour ceux qui sont en Allemagne, un spectacle à ne pas manquer, en espérant que le spectacle soit à nouveau rejoué en France très rapidement.

(c) Sasha Waltz & Guests

 

(c) Sasha Waltz & Guests

 

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